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Sanctions : précisions sur le délai de convocation au conseil de discipline

Public - Droit public général
17/09/2019
Par un arrêt rendu au sujet d’une fonctionnaire hospitalière, la Haute cour a souligné l’importance du délai de convocation au conseil de discipline. Ainsi, alors que l’Administration avait adressé une lettre de convocation plus de quinze jours avant la tenue du conseil de discipline, le Conseil estime que la fonctionnaire n’avait pas bénéficié d’un délai de quinze jours pour préparer sa défense.
Une fonctionnaire hospitalière avait été révoquée et avait saisi le tribunal administratif en vue de sa réintégration. Après rejet de sa demande en première instance et en appel, elle vient se pourvoir en cassation.
 
L’article 2 du décret du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires hospitaliers prévoit une convocation du fonctionnaire « quinze jours au moins avant la date de la réunion de ce conseil, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ».
 
Jurisprudence Danthony
 
Le Conseil vient rappeler, en application de sa jurisprudence Danthony (CE, ass., 23 déc. 2011, n° 335033, M. Danthony et autres) qu’ « un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultative, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer (…) une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie ».
 
Il reviendra donc à la Haute cour d’analyser si l’éventuel non-respect du délai de quinze jours a pu influencer l’avis du conseil de discipline et donc la décision de l’Administration de révoquer la fonctionnaire, ou si cette dernière a été privée d’une garantie.
 
En ce qui concerne la règle du délai de convocation, le Conseil estime qu’elle « constitue pour l’agent concerné une garantie visant à lui permettre de préparer utilement sa défense ». Il ajoute : « la méconnaissance de ce délai a pour effet de vicier la consultation du conseil de discipline, sauf s’il est établi que l’agent a été informé de la date du conseil de discipline au moins quinze jours à l’avance par d’autres voies ».
 
Respect du délai d’envoi de la convocation…
 
Le Conseil d’État relève dans son arrêt que l’employeur avait expédié le 10 juin 2014 une lettre recommandée convoquant l’agente à une réunion du conseil de discipline du 27 juin. Il souligne que la lettre « a été vainement présentée à son domicile le 12 juin » et « a été retirée le 20 juin 2014, soit sept jours avant la réunion ».
 
Selon les juges d’appel, la requérante « aurait pu retirer sa convocation dans le délai réglementaire ». L’Administration avait effectivement adressé la convocation dans le délai prévu de quinze jours. Les juges ont déjà considéré qu’il revenait au fonctionnaire convoqué de retirer sa lettre dans le délai réglementaire (v. notamment CAA Nantes, 25 avr. 2002, n° 98NT02283). Ainsi, l’Administration avait, en envoyant la lettre dix-sept jours avant le conseil de discipline, bien respecté le délai de quinze jours prévu par l’article 2 du décret du 7 novembre 1989.
 
…mais privation d’une garantie
 
Toutefois, comme le souligne le Conseil d’État, la cour avait relevé « que le directeur (…) avait adressé le 19 juin 2014 à son avocat un courrier contenant le rapport disciplinaire, la liste des témoins et la convocation ».
 
Pour le Conseil, ce qui importe n’est pas uniquement le délai entre l’envoi de la lettre de convocation et la tenue du conseil de discipline, mais le délai dont le fonctionnaire dispose pour préparer sa défense. C’est ainsi qu’alors même que l’Administration a bien envoyé la convocation plus de quinze jours avant le conseil, elle est en faute dans la mesure où elle a adressé des éléments à l’avocat moins de quinze jours avant la tenue du conseil de discipline. Ainsi, « en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constats que (la requérante) n’avait pas bénéficié d’un délai de quinze jours pour préparer sa défense, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit ».
 
Réintégration de l’agente
 
Le Conseil estime, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative (CJA), qu’ « il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond ».
 
En application de l’article L. 911-1 du CJA, il indique que l’annulation de l’arrêté de révocation du centre social où travaillait la fonctionnaire « implique nécessairement que cette autorité procède à sa réintégration », et lui enjoint d’y procéder dans un délai de trois mois, plus de cinq ans après la révocation de l’agente.  Il rappelle toutefois que l’Administration a « la possibiltié de prendre à nouveau (…) une sanction disciplinaire au vu d’un avis émis régulièrement ».
 
 
Pour en savoir plus, v. Le Lamy Fonction publique territoriale n° 620-83 et suivants
Source : Actualités du droit