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Covid-19 : précisions sur les règles applicables devant les juridictions administratives

Public - Droit public général
27/03/2020
Une ordonnance publiée au Journal officiel du 26 mars 2020 en application de la loi d’urgence, présente les règles dérogatoires et exceptionnelles applicables aux juridictions administratives depuis le 12 mars 2020 et ce, jusqu’à la fin de l’état d’urgence sanitaire.

L’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 permet au Gouvernement de prendre par ordonnance, toute mesure relevant du domaine de la loi pour faire face aux conséquences, notamment de nature administrative ou juridictionnelle, de la propagation de l'épidémie de covid-19.
À cette fin, les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement des juridictions de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d'organisation du contradictoire devant les juridictions ont été adaptées.
  1. Organisation et fonctionnement des juridictions
Vacance ou empêchement
Les délibérations des formations de jugement des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, peuvent se tenir, en cas de vacance ou d’empêchement, avec un ou plusieurs magistrats en activité dans l’une de ces juridictions. Ils sont alors désignés par le président de la juridiction ainsi complétée sur proposition du président de la juridiction d'origine. Et dans les mêmes conditions, des magistrats honoraires peuvent être désignés en respectant les dispositions de l’article L. 222-2-1 du code de justice administrative (CJA).
 
Les magistrats ayant le grade de conseiller et une ancienneté minimale de deux ans peuvent être désignés par le président de leur juridiction pour statuer par ordonnance dans les conditions prévues à l'article R. 222-1 du CJA.
 
Communication des pièces, actes et avis
Cette communication aux parties est faite par tous moyens.
 
Audience
Le président de la formation de jugement peut décider que l'audience aura lieu hors la présence du public ou que le nombre de personnes admises à l'audience sera limité. Les moyens de télécommunication audiovisuelle seront utilisés pour les audiences dans la mesure où l’identité des parties, la qualité de transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats seront garantis. Si ce n’est pas possible techniquement, le juge pourra, par décision insusceptible de recours, décider d'entendre les parties et leurs avocats par tout moyen de communication électronique, y compris téléphonique, permettant de s'assurer de leur identité et de garantir la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges.

La présence physique du conseil ou de l’interprète d’une partie auprès d’elle, n’est pas requise.
Il revient au juge d’organiser et de conduire la procédure dans chacun des cas précédemment mentionnés. Il s'assure du bon déroulement des échanges entre les parties et veille au respect des droits de la défense et au caractère contradictoire des débats. Le greffe dresse le procès-verbal des opérations effectuées.
 
Le président de la formation de jugement peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience des conclusions sur une requête.
 
Le président de la cour ou le président de chambre peut statuer sans audience publique sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 du CJA, par dérogation aux dispositions de l’article R. 222-25 du CJA.
Par dérogation à l'article R. 741-1 du CJA aux termes duquel les dispositions applicables aux ordonnances ne sont pas rendues en audience publique, la décision pourra être rendue publique par mise à disposition au greffe de la juridiction.
Minute de la décision
Elle pourra être signée uniquement par le président de la formation de jugement, par dérogation aux dispositions des articles R. 741-7 à R. 741-9 du CJA.
 
Notification de la décision
Lorsqu'une partie est représentée par un avocat, la notification prévue à l'article R. 751-3 du CJA est valablement accomplie par l'expédition de la décision à son mandataire.
 
Audience de référé
En dehors des cas prévus par l’article L. 522-3 du CJA, le juge des référés pourra statuer sans audience, par ordonnance motivée, sur les requêtes présentées en référé. Le juge des référés informe les parties de l'absence d'audience et fixe la date à partir de laquelle l'instruction sera close.
Comme le précise l'article L. 523-1 du CJA, les décisions prises sans audience par le juge des référés saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du CJA, peuvent faire l'objet d'un appel lorsqu'elles n'ont pas été rendues en application de l'article L. 522-3 du même code.
 
Éloignement des étrangers
Les jugements relatifs aux mesures d’éloignement notifiés à des étrangers placés en rétention administrative ne seront pas prononcés à l’audience, en dérogation aux dispositions de l’article R. 776-27 du CJA.
 
  1. Délais et procédures de jugement
Procédures relatives aux étrangers
S’agissant des recours contre une obligation de quitter le territoire français (OQTF), sous réserve de ceux prévus au premier alinéa du III de l'article L. 512-1 du ceseda (recours de l’étranger placé en rétention administrative), ainsi que les recours prévus aux articles L. 731-2 (recours devant la Cour nationale du droit d’asile contre les décisions de l’OFPRA) et L. 742-4 du ceseda (recours contre une décision de transfert dans le cadre de la procédure « Dublin »), le point de départ du délai de recours est reporté au lendemain de la cessation de l'état d'urgence sanitaire, soit le 25 mai 2020 (sauf si l’état d’urgence sanitaire est prolongé par le législateur ou si le conseil des ministres y met fin avant par décret). Il en va de même du délai prévu à l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique (demande d’aide juridictionnelle pour un recours devant la Cour nationale du droit d’asile).
 
Les délais applicables aux procédures prévues à l'article L. 213-9 du ceseda (recours contre un refus d’entrée au titre de l’asile assorti d'une décision de transfert « Dublin ») et au premier alinéa du III de l'article L. 512-1 du ceseda (recours contre un placement en rétention administrative) ne font pas l'objet d'adaptation.

Contentieux électoral
L’Ordonnance précise que les réclamations et recours prévus à l'article R. 119 du code électoral peuvent être formés contre les opérations électorales du premier tour des élections municipales organisé le 15 mars 2020 au plus tard à dix-huit heures le cinquième jour qui suit la date de prise de fonction des conseillers municipaux et communautaires élus dès ce tour, fixée par décret au plus tard au mois de juin 2020 dans les conditions définies au premier alinéa du III de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ou, par dérogation, aux dates prévues au deuxième ou troisième alinéa du même III du même article.
 
Clôture d’instruction
Les mesures de clôture d'instruction dont le terme vient à échéance pendant l’état d’urgence sanitaire, sont prorogées de plein droit jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la fin de cette période, à moins que ce terme ne soit reporté par le juge.
 
Délai pour statuer
Durant cette période de deux mois d’urgence sanitaire, le point de départ des délais impartis au juge pour statuer est reporté au premier jour du deuxième mois suivant la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire.
Par dérogation à l'alinéa précédent :
Les délais pour statuer sur les recours contre un refus d’entrée au titre de l’asile assorti d'une décision de transfert « Dublin » (Ceseda, art. L. 213-9) et contre une mesure de placement en rétention administrative au (Ceseda, art. L. 512-1 III et au IV) ne font pas l'objet d'adaptation.
Et le délai imparti au tribunal administratif pour statuer sur les recours contre les résultats des élections municipales générales organisées en 2020 expire, sous réserve de l'application de l'article L. 118-2 du code électoral, le dernier jour du quatrième mois suivant le deuxième tour de ces élections.
 
Source : Actualités du droit